Les textes suivants sont extraits du blog de Guillaume Cingal, maître de conférences en anglais : http://tourainesereine.hautetfort.com :
« Hier matin, en les voyant afficher partout leurs affiches gribouillées de vert et de rouge, je me disais que ces habitués de la grogne avaient dû passer une nuit blanche à leurs barbouillages et que l'étape suivante, dans leur délire (certainement médicamenteux), consisterait à sortir des vingtaines de tables des salles de cours et à bloquer toutes les entrées. Bingo ! »
« J'ai discuté près d'une demi-heure avec un groupe d'étudiants "bloqueurs", qui avaient l'air plutôt fins et modérés, à l'exception d'un espèce de bègue complètement allumé. Ils m'ont assuré que, contrairement au mouvement du printemps 2006, la démocratie serait respectée dans les A.G. Je suis très sceptique, car le terrorisme rhétorique et l'infiltration sont les procédés habituels d'une minorité de "meneurs", mais attendons de voir... »
« Pour le moment, ça ressemble à s'y méprendre au mouvement de février-avril 2006 : on s'agite dans tous les sens pendant plusieurs semaines, puis, quand on voit que l'immense majorité des étudiants s'en contrefout, on décide d'imposer son opinion minoritaire à la majorité, et par la force. Sur le trottoir, la quasi-totalité des étudiants lançaient, d'un air blasé ou furibard, des "Ah non, ça ne va pas recommencer, leurs conneries..." Si, après ça, le blocage est voté à la majorité lors de la fameuse A.G., on pourra croire au Père Noël... »
« Quand le blocage de la fac sera terminé, ces braves étudiants soi-disant de gauche laisseront les agents se taper le travail de rangement et nettoyer leur bazar.
Par ailleurs, si un incendie se déclare, les membres du personnel coincés à l'intérieur du site Tanneurs ne pourront pas emprunter les sorties de secours. Ceux des "bloqueurs" avec qui j'ai discuté cette après-midi m'ont déclaré qu'il n'y aurait "pas d'incendie". Je suppose qu'ils sont capables de décider en A.G. que les incendies n'existent pas... enfin, du moment qu'ils empêchent les personnes d'un avis différent de parler, bien sûr... »
« Je me permets de citer un extrait du communiqué publié hier soir par les étudiants bloquant le site des Tanneurs :
Présidée par une militante de l’UNEF, un militant de SUD et un indépendant, l’AG a largement donné la parole aux étudiants laissant même des étudiants prendre la parole en faveur de la réforme, sans convaincre grand monde.
Outre que le sens de cette phrase est difficile à saisir, faute d'une syntaxe cohérente, on remarquera que :
1) les trois présidents de séance étaient favorables au blocage : belle conception de la démocratie !
2) le droit des opposants à la parole est présenté comme une faveur extraordinaire ("laissant même") et non comme un fonctionnement démocratique normal. Si cela est vrai, toutefois, cela constitue une amélioration sans précédent par rapport au mouvement de blocage du printemps 2006. En effet, à l'époque, tout étudiant qui commençait à argumenter en faveur d'un déblocage du site se faisiait aussitôt traiter de "lepéniste", de "facho", voire molester.
3) le communiqué ne précise à aucun moment que l'amphithéâtre Thélème était bondé et que tous les étudiants qui se trouvaient à l'extérieur étaient hostiles au blocage et n'ont pu prendre part au vote, un filtrage soigneux ayant été mis en place par le comité d'organisation du blocage. J'ai pu constater cela de visu à trois heures de l'après-midi, et discuter longuement avec un groupe d'étudiants de 3ème année de L.E.A., tous inquiets et favorables à une reprise immédiate des cours : aucun n'a finalement pu s'exprimer, ni voter.
La poursuite du blocage jusqu'à lundi a été votée par 575 étudiants (soit moins de 10% des étudiants des UFR du site Tanneurs).
Rappelons que l'un des votes des A.G. d'avril 2006 avait été précédé de l'annonce suivante, de la part de certain militant syndical reconnaissable à son porte-voix et à son écharpe : "Que ceux qui sont pour le CPE ou qui se sont abstenus quittent l'amphi ou le service d'ordre s'en chargera." Avec de tels précédents, comment imaginer que le vote d'hier soir a pu se dérouler dans le respect de la démocratie ?
On prend les mêmes et on recommence... sauf que, cette fois-ci, je ne passerai pas des journées entières à envoyer des cours par e-mail aux étudiants, et je refuserai de remplacer les cours dans des conditions invraisemblables après la fin du blocage. Si tous les étudiants doivent passer leur premier semestre en juin, lors de la session de rattrapage, tant pis... »
« Aujourd'hui encore, j'ai pu constater de visu le comportement agressif et irresponsable des étudiants "bloqueurs". L'un de mes collègues, qui assurait un cours de concours (c'est-à-dire un cours non affecté, en théorie, par le blocage), a été dérangé trois fois par des étudiants qui l'ont violemment pris à partie. Dans une autre salle du rez-de-chaussée, j'ai assisté à l'une de ces altercations musclées ; ce n'était pas beau à voir...
Par ailleurs, deux étudiantes "bloqueuses" m'ont expliqué doctement que le devoir des enseignants était d'être "solidaires" du mouvement et de continuer à assurer leurs cours par mail, puis de rattraper les cours une fois la situation revenue à la normale ! C'est curieux : même le gouvernement de droite si universellement honni n'a pas réussi à nous imposer de travailler pour du beurre. Les syndicats étudiants responsables du blocage voudraient, eux, contraindre les enseignants à assurer des centaines d'heures supplémentaires non rémunérées...
On nage en plein délire... »
« En moins d'une heure, j'ai discuté avec une trentaine de mes étudiants, qui déplorent tous que les étudiants défavorables au blocage restent chez eux, et qui se sentent, du coup, isolés. En effet, c'est regrettable, car tous les étudiants subiront les conséquences désastreuses de ce mouvement à la légitimité douteuse.
Les responsables de plusieurs filières m'ont dit qu'ils croulaient, comme moi, sous les e-mails d'étudiants inquiets. Au lieu de s'inquiéter dans leur coin, ils feraient mieux d'agir et d'occuper le terrain dans les A.G....!
Une étudiante de 3ème année a lancé l'idée d'une pétition, ce qui aurait le mérite de montrer qu'une immense majorité des étudiants est hostile à ce blocage. »